Masuleh est un petit village, mais un haut lieu touristique iranien, accroché à la montagne à une heure de route de Rasht. La seule et unique voie d’accès arrive par le bas et se transforme en piste qui contourne le village par le sud ouest pour repartir au-dessus après une côte abrupte.
Les alentours
Autour dominent de hautes montagnes densément arborisées aux sommets dénudés qu’un fin duvet vert couvre à cette saison. Des rivières et des sources coulent ça et là. En mai, de nombreuses fleurs décorent les ravins et les talus. Les paysages sont magnifiques, à cent lieues des stéréotypes désertiques liés à l’Iran.
Le bazar
Le village, entièrement piéton et constitué de petites ruelles sinueuses à flanc de coteau, se situe donc à la droite de la route lorsqu’on arrive de Fuman. En suivant ces ruelles, on arrive presque invariablement au bazar, le centre de Masuleh. Il n’a rien d’un bazar de fruits et légumes. A l’exception de quelques épiceries, on y trouve essentiellement de petites échoppes de babioles en tous genres destinées aux touristes iraniens, ainsi que des terrasses ombragées. Ces dernières proposent des qalyans et de la petite restauration, comme des kebabs ou des dizi. Elles sont situées sur les toits des bâtiments inférieurs et constituées de mobilier en lambourdes brutes assemblées et recouvertes de fins tapis locaux. De grandes bâches plastiques les recouvrent.
Masuleh, sa mosquée
Autour s’étend le village, collé aux pentes escarpées. Tellement escarpées que les toits constituent la cour et le lieu de vie des bâtiments situés au-dessus. Les maisons, dont certaines ont plusieurs centaines d’années, sont construites en pisé ocre, qui donne un cachet assez exceptionnel au village, quelque soit l’angle de vue. Des sentiers et des escaliers étroits serpentent entre les maisons. La marotte des gens d’ici, ce sont les géraniums. Il y en a partout, sur les terrasses, aux balcons, même à vendre. En contrebas du bazar se situe une mosquée verte, elle aussi très ancienne, qui renferme le tombeau d’une personnalité mineure du chiisme. La femme d’un frère d’un des douze imams, si j’ai bien compris.
Tourisme iranien
Les couples et les familles qui peuvent se le permettre viennent souvent ici à la journée, retrouver un peu de fraîcheur et se remplir des yeux de verdure. Quelques uns y séjournent une ou deux nuits. Certains viennent en bus, d’autres avec des voitures bourrées jusqu’à la gueule. Les hôtels sont peu nombreux et souvent complets, mais beaucoup de villageois offrent des « suites » aménagées aux touristes de passage. Il s’agit de chambres de deux à six lits, salle de bains et kitchenette où l’on peut se faire sa popote. D’autres préfèrent camper. En matinée le bazar se rempli, puis se vide en fin d’après-midi. Les visiteurs s’aventurent rarement dans le village au-delà du bazar, bien que certains fassent de la randonnée dans la région, et le soir les restos sont presque vides.
Une vie rude
La manne touristique sort Masuleh de la morosité économique ambiante et permet aux villageois de sauver leurs anciennes maisons de la ruine, mais la vie ici reste rude, malgré le tourisme, l’électricité et l’eau chaude. L’accès au village étant impossible aux véhicules, tout transport de marchandises pour la construction ou l’approvisionnement du bazar s’effectue à la brouette, généralement par des petits vieux secs, au teint buriné, souffrant à longueur de journée sous l’effort et le soleil. Les escaliers des ruelles sont pourvus de petites rampes pour le passage des dites brouettes. D’autre part, la région est recouverte de deux à trois mètres de neige en hivers. Masuleh reste toutefois accessible à cette période également.
Le village est par ailleurs approvisionné en eau de source, dont la qualité fait la fierté des habitants. Elle est partout potable au robinet.
Climat
Alors qu’il fait facilement entre 35 et 40°C à Téhéran fin mai, ici les températures sont fraîches. Le soleil tape en journée, mais il y a constamment un petit vent frais qui ravive. Divin. Souvent, des nuages recouvrent la vallée en fin d’après-midi et le mercure descend alors entre 20 et 25°C. Les nuits peuvent être fraîches aussi. Lors de mon séjour, la température avoisinait les 15-16°C à l’extérieur vers deux heures du mat’, bien qu’il ait rarement fait au-dessous de 20°C dans ma chambre.
Un havre de paix
En arrivant, je me suis dit que pour celle ou celui qui connaît les petits villages de montagne de l’Himalaya indien, Masoleh ne casse rien. Puis la vision change. C’est un petit havre de paix et de fraîcheur bienvenu durant un voyage en Iran. Hors du soleil de plomb, hors des villes frénétiques et bruyantes. Un lieu pour se reposer et se ressourcer, où les habitants sont particulièrement hospitaliers. Je pensais n’y rester que deux jours, j’y suis resté quatre. Et serais bien resté une ou deux semaines.
Un coup de cœur, indiscutablement.